Sur-mesure par nature : la devise du parfumeur Jean Niel se prête bien à la conception-rénovation du nouveau bâtiment Arômes. Inauguré en 2014, il répond à un engagement fort de sécurité et santé au travail, aux attentes des clients, et il augmente l’efficacité de la production. Les aromaticiens peuvent avoir du « palais ».
Jean Niel est parfumeur depuis neuf générations. Réputé internationalement pour le choix de ses matières premières « 100% pures et naturelles », il commence à développer des arômes alimentaires à partir de 1998.
« Aujourd'hui, les arômes représentent près de la moitié de l’activité globale », indique Marie-Christine Voynnet, directrice générale du secteur Arômes. Boissons, produits laitiers, biscuiterie… « En raison de la croissance des volumes d’arômes que nous produisons [2 000 tonnes par an] et de la diversité des types de développement, nous avions besoin de redéployer complètement l’environnement de travail pour permettre à la division Arômes de continuer sur sa lancée et répondre aux attentes de nos clients. »
Jean Niel est implanté à Grasse (06). Historiquement, le siège se composait de deux bâtiments, un bâtiment Parfumerie et un bâtiment Arômes. En 2012, une étude de conception est lancée pour rénover ce bâtiment ancien. Inauguré en septembre 2014, le nouveau bâtiment abrite les parties Administration et Recherche & Développement de l’activité Arômes. En face, le bâtiment historique a gardé les parties Production et Contrôle qualité de l’activité Arômes.
Une démarche participative
Très tôt, les utilisateurs sont impliqués dans le projet. Des réunions sont organisées pour présenter les plans du futur bâtiment. En passant de 1 à 2 niveaux, on gagne en surface : de 500 m2 à 1 300 m2. 4 grandes zones sont prévues : administration et création aromatique à l’étage, mise en application et services clients au rez-de-chaussée. L’effectif s’agrandit, avec 10 nouveaux salariés, soit une quarantaine de salariés au total pour les parties Administration et R&D.
Cette phase d’étude repose sur 4 exigences : la sécurité et le respect de la réglementation, les points positifs de l’ancienne installation en termes d’utilisation (organisation et conditions de travail), les points d’amélioration, les contraintes du nouvel environnement.
« Cet environnement appartient aux utilisateurs, déclare Mme Voynnet. Il était indispensable d’obtenir leur adhésion au projet et de faire appel à leur coopération pour améliorer l’ergonomie et l’utilisation au quotidien. »
Bien-être et sentiment d’appartenance
« Les anciens locaux étaient très bruyants », se souviennent les préparatrices. Une même zone regroupait les deux services Création et Application. Aujourd'hui, ils sont séparés, la surface du laboratoire Création a été multipliée par 3 et les nuisances liées au bruit sont supprimées. « Lorsqu’on est arrivé ici, on a pu respirer. Une nouvelle vie ! » affirment-elles. C’est à leur demande si certaines orgues à arômes (bases, infusions, huiles essentielles) ont été rendus plus accessibles. En 2015, toujours à leur demande, les sièges ont été remplacés par des modèles assis-debout plus ergonomiques. « Nous avons été entendues. »
Le sens de la relation client
Il n’est pas rare de voir le directeur marketing d’une société cliente venir sur place pour participer à l’élaboration d’une saveur aux côtés des aromaticiens. Des allées lumineuses, des salles de réunions spacieuses, dans des bureaux confortables, à proximité des équipes, favorisent le partenariat avec le client. « Nous mettons à disposition de nos clients tous les moyens nécessaires pour qu’ils avancent le plus rapidement possible sur leur maquette. »
Sur la photo, le bar à dégustation réservé à la clientèle. Au fond, par la baie vitrée, on aperçoit le laboratoire Applications. « Le client a le sentiment de participer à sa cuisine. »
PAROLE DU PROFESSIONNEL : « L’éclairage naturel, l’ergonomie des locaux, la suppression des manutentions et l’optimisation des flux, l’aération et l’assainissement de l’air… tout a été pensé pour procurer du bien-être, de la sécurité, et au final, un sentiment d’appartenance aux utilisateurs. » Marie-Christine Voynnet, directrice générale du secteur Arômes, Jean Niel
Une organisation raisonnée des espaces de travail
De la création des arômes au 1er étage à la mise en application et la distribution vers le client au rez-de-chaussée, toute l’organisation du bâtiment a été pensée pour s’adapter à la logique de production.
La « marche en avant » : le personnel arrive par une porte d’accès réservée au personnel badgé. Aussitôt il a accès aux vestiaires homme/femme avec douches, aux sanitaires et à la blanchisserie où l’on récupère des blouses propres. Il rejoint ensuite son service sans faire d’aller-retour.
Le laboratoire de création au 1er étage est à proximité de l’équipe commerciale. Les aromaticiens sont « le palais » du laboratoire R&D. Au nombre de 4, ils écrivent des formules qu’ils confient aux préparatrices pour la pesée. « On sent, on compare, le va-et-vient est permanent entre nous », explique l’un d’eux. Leurs bureaux sont tout proches des préparatrices qui affinent les produits en effectuant des pesées. « Les conditions de travail n’ont plus rien à voir avec l’ancien bâtiment, nous dit Monique (sur la photo). Le travail est beaucoup plus efficace. » Un peu plus loin se trouve le laboratoire analytique, où un appareillage sophistiqué permet de décrypter le profil aromatique de n’importe quel produit. Un gain de temps très précieux pour les aromaticiens.
Le laboratoire d’application au rez-de-chaussée introduit les arômes dans des produits finis de type boisson, yaourt, glace, biscuit… afin de vérifier s’ils ont le rendu attendu. « C’est agréable de travailler dans un bâtiment neuf et bien pensé, reconnaît Diane, technicienne application boisson (sur la photo). Cela évite de faire des allées-et-venues avec les échantillons. » En toute logique, son labo s’ouvre sur l’aromathèque où sont stockés tous les échantillons développés chez Jean Niel, la salle de préparation des échantillons, la salle-test dédiée à l’analyse sensorielle et à la dégustation, sans oublier le bar à dégustation. Tout se tient.
Un monte-plats pour supprimer les manutentions
Les laboratoires de création et d’application s’échangent en permanence des échantillons. Sur la première photo du diaporama ci-dessous, Amandine, préparatrice au 1er étage, envoie des échantillons d’arômes au laboratoire d’application situé au rez-de-chaussée. Tout risque lié à la circulation des personnes et des produits est supprimé.
Des « pneumatiques » pour communiquer entre les 2 bâtiments
La production et le contrôle qualité ont été séparés de la partie administrative et R&D dans deux bâtiments distincts. Il a donc fallu trouver une solution pour les faire communiquer entre eux. Un système de transport pneumatique a été installé à chaque étage du bâtiment Arômes. Le tuyau d’aspiration qui relie les deux bâtiments permet de s’échanger des documents ou des échantillons. Très utilisé dans la santé et l’industrie, « ce système évite les allées-et-venues et nous fait gagner en rapidité, observe Mme Voynnet. En deux ans d’activité, il n’est jamais tombé en panne. »
L’ergonomie des locaux
Dans la partie administrative, les tables de bureaux ont des bords arrondis, les fauteuils sont ergonomiques, l’espace est convivial. Dans les bureaux des managers, il y a toujours une table pour recevoir les collaborateurs. « La rencontre est favorisée pour avancer tous ensemble. »
Dans la zone de préparation, les sièges ergonomiques ont été testés pendant plusieurs semaines, combinant toutes les possibilités assis et debout. Aux postes de pesée, les orgues à arômes sont à portées de main, ainsi que la poubelle ou les tiroirs de rangement. Le stockage de certaines matières premières a été optimisé dans une petite chambre froide.
L’éclairage naturel
« L’ancien bâtiment était un grand rectangle très profond, avec des fenêtres uniquement en périphérie, explique Mme Voynnet. Le modèle d’aménagement intérieur a privilégié les puits de lumière et la mise en avant des zones très fréquentées par le personnel vers la lumière extérieure. Les lieux de stockage ou les zones de passage ont été repoussées vers l’intérieur. » Dans la zone de préparation, le puit de lumière naturelle (en photo) apporte confort et sécurité aux préparatrices. De plus, des détecteurs de lumière ont été posés dans les couloirs, des variateurs d’éclairage dans chaque bureau.
Des systèmes de ventilation adaptés
Dans le laboratoire de création, chaque préparatrice a son poste de pesée. Comme on le voit sur la photo, chaque poste de pesée a un système d’extraction d’air qui est canalisé grâce à un encoffrement de la balance. Un test au fumigène est réalisé chaque semestre pour visualiser le flux d’air. Les vérifications des débits et des vitesses d’air sont également effectuées régulièrement.
Un lieu de stockage (deuxième photo du diaporama) est réservé aux matières premières qui exigeaient auparavant le port du masque. La balance est posée dans un poste d’aspiration placé dans un encoffrement de type sorbonne. Les produits sont stockés dans cette zone. La préparatrice n’a plus à se demander si elle doit porter un masque ou pas.
Dans le laboratoire d’analyse, le système d’extraction (quatrième photo du diaporama) est encore différent. C’est un bras aspirant qui va capter les polluants à la source.
Un code couleur pour les déchets chimiques
Chaque service a deux éviers : le blanc pour se laver les mains, le noir pour les reliquats d’arômes qui sont redirigés vers un bassin de rétention à l’extérieur du bâtiment. Les déchets sont maîtrisés. « Le multi-affichage d’informations n’était pas suivi, observe Mme Voynnet. Cette méthode intuitive est efficace à 100%. »
Sécurité à tous les étages
Pour éviter tout risque d’intrusion, l’entrée de l’usine a été reconfigurée avec un double portail à l’entrée et un parking visiteur. Placé sous vidéo-surveillance, le site comprend un accès visiteur et un accès réservé au personnel sur présentation du badge.
A la demande de Patrick Ortéga, contrôleur de sécurité à la Carsat Sud-Est, des garde-corps ont été ajoutés en toiture-terrasse sur les plans d’architecture. Sa relation à l’entreprise est régulière, « notamment à travers le CHSCT. Il y a quelques années, Jean Niel a signé un contrat de prévention avec la Carsat Sud-Est pour mettre en place des ventilations dans ses ateliers de fabrication. Cette rénovation d’un ancien bâtiment est exemplaire. On sait que l’existant a toujours des limites en termes de faisabilité. »
Prochain objectif chez Jean Niel : mener la même réflexion pour le bâtiment d’en face, le site Production et Contrôle qualité, afin de redéployer les capacités, augmenter la productivité, l’ergonomie et l’efficacité. Toujours dans un esprit participatif.
Investissement : Jean Niel, Grasse (06130)
Bâtiment Arômes, 41 salariés, 1 300 m2
Durée du chantier de rénovation : 3 ans (conception et travaux)
En savoir plus :
Conception des lieux et des situations de travail, Dossier INRS, 2016.