ABC Industrie emploie 200 personnes et produit plusieurs milliers de tonnes par an de charcuterie cuite et sèche. En 2014, l’entreprise a signé un contrat de prévention avec la Carsat Sud-Est, et actuellement elle finalise la démarche TMS Pros. Charlotte Guion est l’animatrice Sécurité Environnement. Ça tombe bien : le Mag Solutions Prévention célèbre la journée des femmes.

Le Groupe Loste Tradi-France compte 1 600 salariés en France répartis sur 9 sites de fabrication. Depuis 1866, il perpétue le savoir-faire des artisans bouchers-charcutiers en innovant dans ses process de fabrication industrielle. Son réseau de 6 plateformes logistiques et 120 chauffeurs-livreurs lui permet de distribuer ses produits dans la France entière auprès des professionnels des métiers de bouche. Les 3 animateurs Sécurité Environnement Groupe sont chapeautés par un responsable Qualité Sécurité Environnement.

Une intégration en douceur

Charlotte Guion avait une première expérience de responsable Qualité dans une entreprise de granulés de viande. De formation ingénieur en management de la qualité et risques industriels, elle a pu appréhender plus facilement la complexité des process de fabrication lorsqu’elle a pris en main la sécurité et l’environnement d’ABC Industrie en novembre 2012. « J’ai commencé par asseoir mes connaissances sur le site de Peyrolles-en-Provence qui comprend l’usine ABC et une plateforme logistique, avant d’élargir progressivement mon champ d’intervention dans 3 autres sites du Groupe » : Douai (Nord), Ussel (Corrèze) et Tence (Haute-Loire), puis dans un nouveau site racheté en 2015 à Brie-Comte-Robert (Seine-et-Marne). Dans un quatrième temps, elle a pris en charge toute la partie chauffeurs-livreurs au niveau national.

ABC Industrie a été racheté par le Groupe LOSTE en 2008. L’usine fabrique principalement du jambon cuit, du bacon, de la saucisse fraîche et du saucisson sec. 160 permanents et 40 intérimaires y travaillent. « La surface est très grande : environ 18 000 mètres carrés, répartis sur 3 étages. » Le savoir-faire est artisanal, mais les moyens sont industriels. « Il m’a fallu un an avant d’acquérir toutes les connaissances techniques et maîtriser la complexité du process. J’ai longtemps observé sur le terrain, au contact des salariés. »

Son poste était précédemment occupé par Philippe Beaudoin, aujourd'hui responsable QSE Groupe. « M. Beaudoin m’a accompagné dans mon intégration. » Échanges écrits, au téléphone, visioconférences… « Il a enrichi mes connaissances techniques et m’a appris à bien communiquer avec les salariés. Ce sont des métiers contraignants. Le plus difficile est d’avoir le bon comportement. »

PAROLE DU PROFESSIONNEL « J’avais les compétences techniques. On m’a embauchée pour mon savoir-être. » Charlotte Guion, Animatrice Sécurité Environnement Groupe, Loste Tradi-France

Son employeur ne s’y est pas trompé.

Les premières mesures

Charlotte Guion va commencer par mettre en place « de petits projets, ciblés sur certains domaines, comme de revoir un EPI ou réaménager un tapis de transit sur un poste de travail ». 

« En tant que femme, on arrive mieux à se faire aider. Le personnel se montre très serviable avec vous. Certains n’hésitent pas à prêter main-forte, pour porter un marchepied par exemple. »

Dans un premier temps, elle a mis à jour le Document Unique. « 63 postes ont été définis, en collaboration avec chaque responsable de service. C’est aussi une manière de lier connaissance. »

Petit à petit, elle va gagner la confiance des salariés et prendre ses marques. « C’est un métier où l’émotion parle. Il faut avoir du répondant vis-à-vis des salariés pour les rassurer. »

Un dialogue permanent avec les salariés

n27 reportage photo1« L’usine ABC est inscrite dans la ville depuis 1947. La plupart des salariés habitent Peyrolles. J’apprécie cet esprit de grande famille. Les rapports sont très communicatifs. Tout comme au niveau du Groupe, qui est très transverse, décloisonné. Dans mon service, il y a vraiment une notion de cohésion et d’esprit d’équipe. »

  • Je communique beaucoup par mail, « avec courtoisie, en faisant toujours très attention à la formulation ».
  • J’anime le CHSCT et je rédige le compte rendu, en lien avec production, la technique, le directeur de site, le service RH, les membres du CHSCT, la Carsat Sud-Est et la médecine du travail.
  • J’organise des réunions de sécurité bimensuelles, en présence de tous les responsables de service et leurs adjoints, la direction, la production, la maintenance et les RH : « on fait le point sur les accidents du travail, les thématiques et actions correctives en cours... »
  • J’organise des groupes de travail : au centre de tri (déchargement des jambons, prise de PH et chargement sur les balancelles), « le port de charge par personne est compris entre 9 et 20 tonnes par jour ! Avec les responsables et adjoints de la technique, de la production et les services de santé au travail, nous réfléchissons à l’aménagement de ces 3 postes. » Un second groupe de travail étudie actuellement l’atelier de moulage (tri, pesée, mis en alvéole) où les nombreux gestes répétitifs et manutentions manuelles peuvent provoquer à la longue des syndromes du canal carpien.

Ces deux groupes de travail font suite à une étude ergonomique de la médecine du travail après analyse du Document Unique et de l’accidentologie. « Mon rôle est d’animer ces groupes, de rédiger le compte rendu, d’établir un plan d’actions et de réaliser le suivi des aménagements. Il faut distinguer les plans d’actions immédiats, qui sont confiés tout de suite aux opérateurs pour les impliquer, des plans d’actions plus lourds, que je traite au travers du plan annuel de prévention. »

La prévention des TMS

Les troubles musculo-squelettiques sont la première cause d’AT-MP au sein du Groupe. Les matières peuvent être lourdes (ex : un jambon pèse entre 10 et 12 kg) et le process demande un savoir-faire manuel, avec beaucoup de manutentions, de gestes répétitifs. Par exemple, le désossage d’un jambon est réalisé sur site, au couteau. « Ce travail d’expert nécessite une formation au poste de travail à minima entre 6 mois et un an. ». Toutes ces caractéristiques nécessitent une approche pluridisciplinaire, technique et ergonomique, au cas par cas, en fonction de l’environnement, de la taille de l’opérateur, etc.

« À mon arrivée, la démarche de prévention des TMS était déjà ancrée dans les mentalités. J’ai consolidé le plan d’actions qui avait été mis en œuvre au sein d’ABC par M. Beaudoin et les services RH. »

Acquisition d’équipements d’aide à la manutention

En 2014, ABC Industrie signe un contrat de prévention avec la Carsat Sud-Est. Sur une période de 3 ans, il a permis d’aider financièrement l’acquisition de matériels visant à supprimer, ou à défaut diminuer, l’exposition des salariés aux risques liés aux manutentions manuelles et aux gestes répétitifs. Ce contrat a également financé une formation à la prévention des risques de chute de hauteur dispensée à 5 personnes de l’équipe Maintenance.

  • n27 reportage photo2La mécanisation des colis lors de leur mise sur convoyeur. En 2015, l’entreprise a fait l’acquisition d’une table à rouleaux gravitaire, qui permet d’introduire automatiquement les caisses sur le tapis, et d’un système de préhension MOBIRAIL, qui permet de soulever par deux les caisses de viandes. « Ce système a totalement modifié le poste de travail et la manière de travailler. Afin de pallier cette difficulté, il a fallu anticiper et impliquer les salariés. Ils ont participé à l’essai avec le CHSCT, et nous les avons accompagnés sur toute la mise en place. De légères modifications ont été apportées. Grâce à cet aménagement, nous avons réduit le port de charge 14 tonnes par jour pour l’opérateur ».

  • La mécanisation du filmage des palettes, avec l’acquisition d’une filmeuse palette automatique permettant de diminuer les postures pénibles aux expéditions.
  • La mécanisation des fûts lors de leur réception, utilisation et stockage, avec l’acquisition d’un gerbeur élévateur pour manutentionner les fûts. « Ce système manuel reprend les fûts de boyaux pour les déposer sur une palette plastique. »
  • Un chariot à fourche de type roll-boy. « Les bobines de films servant à thermoformer les barquettes sont très lourdes. Les chariots roll-boy sont manuels et roulants, ils permettent de positionner les bobines sur des thermoformeuses par basculement. »
  • Des ventouses d’aspiration et palan, pour supprimer le port de charge des barres de jambon destinés au tranchage.
  • Ce sol anti-dérapant jaune (photo 4 du diaporama ci-dessous) a été rénové en 2015 dans l’atelier Saucisserie afin de réduire le risque de chute de plain-pied par glissade des salariés.

Démarche TMS PROS : l’étape n°4 est finalisée

Frédéric Tenenhaus, contrôleur de sécurité à la Carsat Sud-Est, suit l’entreprise depuis 2011. La Caisse Nationale d’Assurance Maladie des Travailleurs Salariés (CNAMTS) a identifié, en 2014,  8 100 entreprises au secteur national au travers de critères en lien avec les maladies professionnelles induites par les TMS. ABC Industrie fait partie de ce panel et s’inscrit de fait dans la démarche TMS PROS. À ce jour, l’ensemble des étapes sont validées : n°1 (état des lieux et inscription de l’entreprise), n°2 (objectifs et priorités), n°3 (diagnostic approfondi et plan d’actions) et n°4 (évaluation finale).

post it ftLE MOT DU PREVENTEUR : «  Ce programme TMS PROS porte pour l’instant, sur 3 postes de travail identifiés dans l’entreprise avec un port de charge maximum. L’objectif in fine de TMS PROS est de rendre l’entreprise autonome dans la prévention des TMS sur l’ensemble des postes de travail concernés. La démarche se veut d’être, à terme, autoportée par l’entreprise, et c’est déjà le cas chez ABC Industrie. Par la suite, l’entreprise progressera d’elle-même, comme elle le fait actuellement au travers du plan annuel de prévention et aux actions immédiates mises en place. » Frédéric Tenenhaus, contrôleur de sécurité, Carsat Sud-Est

n27 reportage photo4Charlotte Guion : « Pour nous, TMS PROS a plutôt été une formalité. Nous travaillons de façon permanente sur la prévention des TMS. Compte tenu de notre activité, cette démarche était déjà bien engagée. Toute la partie diagnostic était déjà réalisée. Les études ergonomiques ont été ajoutées. Le plan d’actions et l’évaluation étaient bien avancés. M. Tenenhaus m’a accompagnée sur le fonctionnement du site TMS PROS et les attendus de cette démarche, pas si facile à comprendre au premier abord. »

10 Journées Sécurité pour les chauffeurs-livreurs

Charlotte Guion gère 3 des 6 plateformes logistiques du Groupe, à Peyrolles-en-Provence, SDP Rungis (Val-de-Marne) et Maxime Géraud (Seine et Marne), ainsi que l’ensemble des 120 chauffeurs-livreurs au niveau national. « Ils travaillent sur des porteurs frigorifiques de 3,5 t. La sensibilisation est axée sur les chutes de plain-pied et les manutentions manuelles, car ce sont les deux premiers risques qui ressortent de l’analyse des accidents du travail. » Rien d’étonnant. D’après les données de l’Assurance Maladie - Risques Professionnels, 9 accidents sur 10 surviennent véhicule à l’arrêt dans le Transport Routier de Marchandises.

Cette année, Charlotte Guion a développé un programme de 10 Journées Sécurité au niveau national, qu’elle anime elle-même. « Cette journée de remontée terrain se focalise sur les EPI, l’organisation du travail, la prestation de service avec le client. » Elles ont déjà commencé et se poursuivront toute l’année 2017.

ABC industrie, Peyrolles-en-Provence (13860) en quelques chiffres

Secteur agro-alimentaire, charcuterie-salaisons-traiteur

Chiffre d'affaires 2016 : 54 millions d’euros

200 salariés, surface de production de 18 000 m2

En savoir plus :

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Contrat de prévention : Convention Nationale d’Objectifs CNAMTS-CFBCT 2013-2017.